cher patric,
dans l’île du soleil levant, isabelle m’a envoyé tes mots.
un peu surprise, mais pas tant finalement.
« elle ferma les yeux pour le revoir »
dans la lumière de fin de jour, tu sais cette lumière dorée exagèremment rousse, fugace, que l’on voudrait retenir pour que la nuit ne vienne pas.
ces quelques instants s’impriment au fond de nos crânes,
cette lumière inoubliable qui nous habite, qui nous fait rêver.
là, elle le revoyait, sylhouette noire élancée, comme une ombre chinoise. elle le revoyait avant de l’oublier, elle serra encore sa main « pour dormir avec lui »
elle l’oubliait, elle savait l’oublier, elle oubliait, même si quelques souvenirs affleuraient à son esprit.
« lui sourit à ce soir 9heures »
à 9 heures ce soir elle n’y serait pas
ni ces 9 heures, ni toutes les 9 heures à venir.
elle ne viendrait plus. plus aucun soir d’aucun jour. les couchers de soleil seraient lettres mortes. aucune heure où elle serait là à attendre.
« les jambes disparues elle entra dans l’eau noire »
oui l’eau était noire, elle avait gardé longtemps le reflet du couchant, puis avait pris la couleur noire et froide qui lui faisait peur.
l’eau au ventre elle frissonna.
pourtant elle était belle cette eau moirée scintillante si vivante. elle charriait des branches, des bouts de plantes, et même des fleurs. des odeurs de bois en décomposition , des odeurs fortes d’après la pluie qui lui donnaient la nausée.
« ses lèvres contre l’étui d’or »
l’étui que tu croyais avoir perdu ? je ne l’ai jamais vu patric. je sais que c’est toi qui lui avait donné, mais je ne l’ai jamais vu une cigarette aux lèvres, fumait-elle ?
« c’était son temps du bonheur »
je ne sais pas, je ne l’ai jamais vu sourire, était elle- heureuse ? toujours son visage fermé, distant, craintif parfois. elle passait comme une ombre, silencieuse et rapide, le temps semblait l’ignorer et elle le lui rendait bien.
un autre temps se dessinait « son temps du bonheur, » je voulais lui parler et elle me parlait
« le temps du bonheur d’une futur mort »
je savais qu’elle aimait, la vie toi sans doute.
mais la vie ...
alors je me suis prise au jeu cher patric
je ne sais pas ce que tu attendais, attendais tu d’ailleurs quelque chose ?
voilà mes mots sur les tiens Je t’embrasse, à bientôt.